Coaching d’organisation : accompagner autrement l’entreprise dans sa transformation culturelle
Au début était le changement
A la fin des années 40, Kurt Lewin conceptualisait le processus de changement qui devait permettre par la suite à une entreprise de planifier ses changements en respectant trois phases (« unfreeze », « change » et « refreeze »).
En 2013, après avoir interrogé 500 chefs d’entreprise, Alter&Go diffusait son Livre blanc de l’accompagnement du changement en entreprise dans lequel il était rapporté que 86 % des dirigeants français jugeaient que leurs entreprises avaient besoin de changer plus vite et plus souvent, que gérer le changement s’imposait désormais comme une pratique incontournable du management d’une entreprise.
Aujourd’hui, les repères sociétaux, économiques et entrepreneuriaux évoluent très vite, la digitalisation et les nouvelles technologies s’imposent dans les organisations, les activités et les nouvelles pratiques managériales. À cela se rajoutent, depuis ces deux dernières années, les difficultés liées à la pandémie du coronavirus, avec son lot de contraintes et de freins mais aussi quoiqu’on en dise d’opportunités. Le changement ne se planifie plus, il s’organise et il s’expérimente en temps réel de l’intérieur comme de l’extérieur.
L’entreprise prise dans le tourbillon du changement
Ces évènements qui s’enchainent, pas toujours planifiables, demandent une adaptation plus rapide de la part des entreprises et une réactivité sans relâche pour rester présents sur le marché et maintenir un équilibre tant au niveau de la performance économique que managériale, tout en s’efforçant de maintenir ses parts de marché et de conserver la place de l’humain dans l’entreprise.
Ces situations tendues complexifient l’analyse des impacts du changement, sur le management des organisations et par conséquent sur les hommes.
Ce qui est attendu aujourd’hui de la part des entreprises : agilité, adaptabilité, réactivité, approche collaborative, démarche en intelligence collective, développement de la coopération et de l’entraide. Autant de notions qui viennent redessiner les contours des rôles et responsabilités des managers et des collaborateurs, mais aussi le champ de la « culture » d’entreprise confrontée à ses capacités d’ouverture et à sa volonté de sortir des chemins battus.
Pour les entreprises, comment faire de ces expériences de transformations, des expériences apprenantes et innovantes ?
Si le choix dans les approches et les méthodes d’accompagnement au changement peut paraître un véritable casse-tête pour un dirigeant du fait de leur multiplicité (conseil, coaching, tutorat, mentorat, formation, etc.), il n’en demeure pas moins que face au changement, les entreprises ne réagissent pas toutes de la même manière. Il apparaît alors essentiel, avant d’opter pour un type d’accompagnement, de se questionner sur : « en quoi repousser l’amorce d’une dynamique de changement, rester camper sur des comportements inadaptés et entretenir des valeurs, qui ne correspondent plus à ce qui se vit aujourd’hui dans mon organisation et dans son écosystème, peut mettre en danger ma structure ?». Dans son ouvrage « Devenir transformateur » (accompagnateur du changement), Pierre Rhéaume nous fait à justement remarquer qu’« on n’attend pas d’être très malade pour aller chez le médecin» ! De son expérience, il constate que les organisations qui réussissent le mieux sont celles qui ont pris l’habitude de se transformer et qu’elles ont de ce fait développer une véritable « culture » de la transformation.
Et le coaching d’organisation dans tout ça ?
Dans les méthodes d’accompagnement de la transformation qui ciblent les changements culturels et comportementaux d’une entreprise, le coaching d’organisation est amené à challenger une organisation sur sa réelle volonté à se mettre en mouvement, à bousculer la culture qui représente le socle sur lequel est construit l’entreprise et qui soude les collaborateurs. Cette pratique doit prendre en compte à la fois la résistance naturelle des individus confrontés au changement et le caractère homéostatique des systèmes à vouloir maintenir leur équilibre.
Ainsi, le coaching d’organisation vient chercher l’entreprise non pas sur son mode de fonctionnement et dans ses processus, ce qui relèverait plutôt de l’ordre du coaching d’équipe, mais bien sur un ou plusieurs éléments de la culture d’entreprise qui seraient à l’origine d’une incapacité à se transformer, à évoluer.
Malgré leur différence structurelle, le point de convergence entre le coaching individuel, le coaching d’équipe et le coaching d’organisation réside dans le fait que les réponses et les ressources, pour trouver des solutions et les mettre en œuvre, se trouvent au cœur de chaque système de l’entreprise : collaborateur, équipe et organisation. C’est le système qui sait le mieux faire bouger son propre système.
Le coaching d’organisation, dans la pratique, va se positionner en facilitateur de cette prise de conscience au niveau de l’entreprise (ensemble des équipes) et le coach d’accompagner l’ensemble du système vers un point de bascule où le changement deviendra opérationnel.
Le coaching d’organisation permet alors d’orchestrer un accompagnement sur mesure et de révéler non pas le contenu de la partition (les procédures) mais le comportement face à cette dernière. Loin de dérouler une procédure de changement, il s’agit plutôt d’adapter le cadre du coaching d’organisation à la spécificité de l’entreprise : prendre en compte son rythme, ses besoins et ses demandes, cerner les objectifs qu’elle se fixe et les problématiques qu’elle soulève, faire émerger ses valeurs même les moins dicibles car ancrées profondément dans les habitudes et les rituels.
La pratique du coaching d’organisation, dans l’accompagnement au changement d’une entreprise, englobe non seulement l’entreprise en tant que système à part entière (organisation /équipe /collaborateur /produit /communication) mais aussi le lien qu’elle entretient avec son écosystème (client, fournisseurs, prescripteurs, etc…). C’est en cela que ce n’est pas le coach - ou l’équipe de coachs d’organisation - qui conduit le changement de l’entreprise mais bien l’entreprise elle-même accompagnée par le ou l’équipe de coachs professionnels.
Tout le système étant sollicité, les différents niveaux de la culture d’entreprise se révèlent ainsi que les habitudes de comportements qui peuvent vite devenir des freins et juguler toute capacité de transformation et donc d’adaptation. Ainsi, ne voit-on pas dans le monde de l’entreprise, les petites start-up qui viennent bousculer et challenger, car plus réactives, plus souples et moins encombrées du poids culturel et des schémas décisionnels, les PME et les multinationales.
Dans le coaching d’organisation, la zone sensible se matérialise par la culture de l’entreprise : c’est la chose la plus partagée, quelle que soit la structure de l’entreprise et en même temps la moins formalisée. « On fait comme ça parce que cela s’est toujours fait comme ça, pas besoin de changer ! ».
La culture d’entreprise est le fil rouge qui permet au collectif de travailler ensemble dans un cadre de valeurs communes, elle renferme le modèle relationnel aux autres mais aussi au monde extérieur, les croyances, les rituels, la genèse de l’entreprise et les habitudes comportementales.
L’approche participative et collaborative dans le coaching d’organisation
L’approche systémique du changement qu’initie Kurt Lewin dans les années 40, et qui défend l’idée que le tout est davantage que la somme des parties qui le constituent, sert notre propos d’intégrer dans la pratique du coaching d’organisation une approche participative et collaborative parce qu’elle vient justement confronter les habitudes comportementales, essentiellement sur le plan managérial.
Un comportement managérial et décisionnel de type top/down voue à l’échec toute tentative de transformation, et si transformation il y a, les risques que le changement ne perdure est fort probable tout comme se voir rejeter par les collaborateurs car peu sollicités ou engagés dans le processus de transformation (ex. fusion/acquisition, absorbation, changement de stratégie, réorganisation des fonctions, digitalisation, etc…). Ce constat est d’autant plus vrai dans le cas d’un accompagnement de substitution où l’accompagnateur fait à la place des collaborateurs et du management puis s’en va.
Alors quoi de plus intégratif, riche en partage d’expérience, en connaissance et en élaboration de solutions qu’une collaboration entre dirigeants et collaborateurs !
Intégrer une approche participative et collaborative dans le cadre d’un coaching d’organisation participe à décloisonner les frontières sociétales au sein de l’entreprise et à faire en sorte que chaque collaborateur, quel que soit son statut, puisse s’exprimer sur les idées, les solutions et sur son vécu du processus de transformation.
Expérimenter l’intelligence collective dans une pratique de coaching d’organisation c’est :
· Écouter les expériences de terrain, les partager et les valoriser,
· Encourager la coopération, la coresponsabilité et la régulation,
· Co-construire ensemble et renforcer la cohésion car tout le monde monte à bord
· Favoriser l’apprentissage de l’autonomie et de l’auto-organisation
· Inciter à la flexibilité et à la réactivité à résoudre des problèmes de manière collective en prenant compte des talents et des compétences de chaque individu.
Insuffler des temps d’intelligence collective dans la pratique du coaching d’organisation permet d’ajuster, tout au long des étapes de la transformation, les comportements managériaux, de les faire évoluer d’une posture verticale et éloignée du terrain à une posture circulaire et de proximité. De permettre à la culture d’entreprise de s’ouvrir à de nouvelles pratiques et comportements.
Josée MEYER, Coach Membre Praticienne SFCoach
Practice Leader en Intelligence Collective Interness Consulting